Les loups, c’est connu, ont réinvesti notre belle terre d’accueil qu’est la France sans l’aide de quiconque, le massif du Mercantour leur ayant servi de base de départ pour reconquérir ces montagnes d’où ils avaient été chassés au 19ème siècle, ils ont déjà franchis le Rhône, et il y aura bientôt dans le Gévaudan plus de bêtes en liberté que dans la réserve. Rassurez vous, nous sommes craintifs, et très discrets, et bien que les lozériens soient généralement des personnes bien nourries et bien appétissantes, nous n’avons pas encore prévu d’en mettre quelques uns au menu du jour. Tout cela pour vous rappeler que j’ai évoqué à plusieurs reprises ma naissance dans un petit village au pied du Mercantour, ce qui fait de moi un loup de bonne lignée tout à fait apte à défendre mes congénères. Je ne priverai pas de l’occasion d’en profiter pour dire quelques vérités sur de « prétendus » bergers des Alpes plus soucieux des primes européennes que de la sécurité et de la qualité de leurs troupeaux qu’ils laissent, jours et nuits, errer dans la montagne sans aucune surveillance, ce qui n‘est pas le cas, je dois le dire de nos bergers cévenols. Lors de la transhumance, j’ai été heureux d’entendre l’un des leurs évoquer le fait que notre présence en Cévennes ne représentait pas un danger ni pour eux ni pour le bétail.
Mais comme d’habitude, je m’égare une fois de plus de mon sujet que je ne vous ai d’ailleurs pas encore dévoilé.
Mon village est situé bien loin de la riviera, à la frontière avec la Provence, sur le Var, qui nous séparait jadis du royaume de France. Je suis cependant « Niçois », l’appellation ne concernant pas seulement ceux qui ont vu le jour sur la promenade des anglais mais par extension elle s’applique aussi à tous les natifs du Comté de Nice.Sous la révolution de 1789, la France fut divisée en départements qui remplacèrent les provinces en tant qu’entité administratives, Comme la campagne d’Italie avait apporté le comté de Nice à la nation il fut crée le premier département des Alpes Maritimes comprenant le comté et une partie du Piémont italien, le Var servant à l’ouest, de limite naturelle avec le département du même nom. Mon village devint sous préfecture (probablement la plus petite de France), et le premier sous préfet eut la joie d’ y voir naître son fils Auguste Blanqui, l’une des grandes figures du mouvement révolutionnaire au 19ème siècle, qui donna bien du soucis à Napoléon III, Louis Philippe, Adolphe Thiers et bien d’autres.
La défaite de Waterloo sonna la fin de notre rattachement à la France pour plusieurs décennies, mais ce qu’un Napoléon perdit, un autre le reconquit. En 1860, coucou !!!, nous voici de retour dans le giron de notre mère Patrie, et pour fêter cela, il fut décidé de créer un nouveau département qui reprendrait le nom des anciennes « Alpes Maritimes » de la France révolutionnaire.Seul petit problème, sans le Piémont il était tout « Riquiqui » à coté de son trop grand voisin le « Var ». On pris donc la partie orientale de ce dernier (la rive droite du fleuve) pour la rattacher au nouveau venu, ce qui en soit était presque parfait. Presque, parce que depuis le « Var » est le seul département de France qui porte le nom d’un fleuve qui ne l’arrose pas. Et c’est là où je voulais en venir.